23 Mars 2018
Jean-Pierre Denis, rédacteur en chef du journal La Vie disait un jour sur KTO : « il est beaucoup plus difficile de faire de "l’œcuménisme entre catholiques" qu'avec les autres chrétiens, parce qu'on touche à quelque chose de plus profond, de plus intime ». Dieu sait que nous ne sommes pas fans de la Vie (premier euphémisme de cet article et pas le dernier, qu'on se rassure), mais il nous a semblé que cette phrase était particulièrement juste.
Et cela n'est jamais plus exact que lorsqu'il est question de liturgie. Et l'un des sujets les plus délicats lorsque l'on cause liturgie entre catholiques (deuxième euphémisme de cet article) est l'offertoire. Simple préparation des dons ou anticipation dramatique du sacrifice ? Action de grâce à Dieu le Père ou évocation de la Passion du Fils ?
Démélons un peu tout ceci et tentons d'y voir plus clair.
Mgr Guido Marini, cérémoniaire de sa sainteté le pape François, offrant à Dieu (selon la liturgie romaine renouvelée par Paul VI) le calice rempli de vin en vue de la consécration.
Pour commencer, voici les textes d'offertoire des deux Missels.
D'abord, voici l'offertoire du Missel romain de 1962 (Forme extraordinaire du rit romain).
Texte latin | Traduction française littérale |
Súscipe, sancte Pater, omnípotens ætérne Deus, hanc immaculátam hóstiam, quam ego indígnus fámulus tuus óffero tibi, Deo meo vivo et vero, pro innumerabílibus peccátis, et offensiónibus, et negligéntiis meis, et pro ómnibus circumstántibus, sed et pro ómnibus fidélibus Christiánis vivis atque defúnctis : ut mihi, et illis profíciat ad salútem in vitam ætérnam. Amen. | Reçois, O Père Saint, Dieu éternel et tout-puissant, cette hostie immaculée, que moi, Ton indigne serviteur, je T'offre à Toi, O mon Dieu vivant et vrai, pour mes innombrables péchés, offenses et négligences, pour tous ceux qui m'entourent et pour tous les fidèles chrétiens, vivants et morts. Qu'elle profite à mon salut et au leur dans la vie éternelle. Amen. |
Deus, qui humánæ substántiæ dignitátem mirabíliter condidísti, et mirabílius reformásti : da nobis per húius aquæ et vini mystérium, eius divinitátis esse consórtes, qui humanitátis nostræ fíeri dignátus est párticeps, Iesus Christus Fílius tuus Dóminus noster : Qui tecum vivit et regnat in unitáte Spíritus Sancti Deus : per ómnia sǽcula sæculórum. Amen. | O Dieu, Toi qui a admirablement fondé la dignité de la nature humaine et l'a plus admirablement encore réformée, donne-nous par le mystère de l'eau mêlée au vin de prendre part à la divinité de Celui Qui a daigné prendre notre humanité, Jésus Christ, Ton Fils, notre Seigneur. Qui vit et règne avec Toi dans l'unité du Saint Esprit, Dieu dans tous les siècles des siècles. Amen. |
Offérimus tibi, Dómine, cálicem salutáris, tuam deprecántes cleméntiam : ut in conspéctu divínæ maiestátis tuæ, pro nostra et totíus mundi salúte, cum odóre suavitátis ascéndat. Amen. | Nous T'offrons, Seigneur, le calice du salut : que selon Ta clémence, il s'élève devant Toi en parfum agréable au regard de Ta Divine Majesté, pour notre salut et celui du monde entier. Amen. |
In spíritu humilitátis et in ánimo contríto suscipiámur a te, Dómine : et sic fiat sacrifícium nostrum in conspéctu tuo hódie, ut pláceat tibi, Dómine Deus. | Puisse-Tu nous accueillir Seigneur, avec un esprit humilié et une cœur contrit ; et puisse T'être agréable notre sacrifice, offert aujourd'hui en Ta présence, O Seigneur Dieu. |
Veni, Sanctificátor, omnípotens ætérne Deus : et bene + dic hoc sacrifícium, tuo sancto nómini præparátum. | Viens, O sanctificateur, Dieu éternel et tout-puissant : et bénis + ce sacrifice préparé pour Ton saint Nom. |
Lavábo inter innocéntes manus meas : et circúmdabo altáre tuum, Dómine. | Je me lave les mains parmi les innocents et fais le tour de Ton autel Seigneur. Pour faire entendre mon chant de louange et narrer toutes Tes merveilles. J’aime la beauté de Ta maison, Seigneur, et le lieu du séjour de Ta gloire. |
Súscipe, sancta Trínitas, hanc oblatiónem, quam tibi offérimus ob memóriam passiónis, resurrectiónis, et ascensiónis Iesu Christi, Dómini nostri, et in honórem beátæ Maríæ semper Vírginis, et beáti Ioánnis Baptístæ, et sanctórum Apostolórum Petri et Páuli, et istórum, et ómnium sanctórum : ut illis profíciat ad honórem, nobis autem ad salútem : et illi pro nobis intercédere dignéntur in cælis, quorum memóriam ágimus in terris. Per eúndem Christum Dóminum nostrum. Amen. | Reçois, Trinité Sainte, cette Offrande, que nous T'offrons en memoire de la Passion, de la Resurrection et de l'Ascension de Jesus-Christ notre Seigneur; et en l'honneur de la Bienheureuse Marie toujours Vierge, du Bienheureux Jean le Baptiste, des Saints Apôtres Pierre et Paul, (des Saints dont nous vénérons les reliques ici,) et de tous Tes Saints ; qu'Elle serve à leur honneur et à notre salut, et que les Saints dont nous faisons mémoire |
Et voici maintenant celles du Missel romain de 2002 (Forme ordinaire du rit romain).
Texte latin | Traduction française littérale | Traduction française officielle |
Benedíctus es, Dómine, Deus univérsi, quia de tua largitáte accépimus panem, quem tibi offérimus, fructum terræ et óperis mánuum hóminum : ex quo nobis fiet panis vitæ. | Bénis es-Tu Seigneur, Dieu de l'univers, car de Tes largesses nous recevons ce pain que nous T'offrons, lui le fruit de la terre et l'oeuvre de la main de l'homme ; il sera pour nous le Pain de Vie. | Tu es béni, Dieu de l'univers, toi qui nous donnes ce pain, fruit de la terre et du travail des hommes ; nous te le présentons : il deviendra le pain de la vie. |
(Benedíctus Deus in sǽcula.) | (Bénis soit Dieu pour les siècles des siècles.) | (Beni soit Dieu, maintenant et toujours.) |
Per huius aquæ et vini mystérium | Par le mystère de cette eau et du vin, puissions-nous être associés à la divinité de Celui qui a daigné participer à notre humanité. | Comme cette eau se mèle au vin pour le sacrement de l'Alliance, puissions-nous prendre part à la divinité de celui qui a partagé notre humanité. |
Benedíctus es, Dómine, Deus univérsi, quia de tua largitáte accépimus vinum, quod tibi offérimus, fructum vitis et óperis mánuum hóminum, ex quo nobis fiet potus spiritális. | Bénis es-Tu Seigneur, Dieu de l'univers, car de Tes largesses nous recevons ce vin, que nous T'offrons, lui le fruit de la vigne et de l'oeuvre de la main de l'homme ; il sera pour nous le breuvage de la joie spirituelle. | Tu es béni, Dieu de l’univers, toi qui nous donnes ce vin, fruit de la vigne et du travail des hommes ; nous te le présentons : il deviendra le vin du Royaume éternel. |
(Benedíctus Deus in sǽcula.) | (Béni soit Dieu pour les siècles des siècles.) | (Beni soit Dieu, maintenant et toujours.) |
In spíritu humilitátis et in ánimo contríto suscipiámur a te, Dómine; et sic fiat sacrifícium nostrum in conspéctu tuo hódie. Ut pláceat tibi, Dómine Deus. | Puisse-Tu nous accueillir Seigneur, avec un esprit humilié et une cœur contrit ; et puisse T'être agréable notre sacrifice, offert aujourd'hui en Ta présence, O Seigneur Dieu. | Humbles et pauvres, nous te supplions Seigneur, accueille-nous ; et que notre sacrifice en ce jour trouve grâce devant toi. |
Lava me, Dómine, ab iniquitáte mea, et a peccáto meo munda me. | Lave-moi Seigneur, de mes iniquités, et de mon péché, purifie-moi. | Lave-moi de mes fautes, Seigneur, purifie-moi de mon péché. |
À partir de là, deux choses. Tout d'abord, veuillez me remercier d'avoir sué sang et eau afin de vous offrir cette remarquable traduction, parfaite et sans défauts aucun. Non, n'essayez pas de chercher des défauts, il n'y en a pas. Remerciez-moi plutôt. Allez ! Et plus vite que ça !
Ensuite... que dire de tout cela ?
La suite dans un prochain article, bandes d'impatients !